Chez Picado de Blas Arquitectos, ils perçoivent le dessin, l’ébauche et le croquis comme des éléments préalables au façonnage d’un espace et comme la phase indispensable du projet final. Nous avons assisté à la conférence pour discuter avec eux de leur processus créatif dans le cadre du cycle Espacio y Materia (Espace et matière) organisé par Tectónica à Finsa21.
María José de Blas et Rubén Picado ont monté leur studio en 1991 (juste après avoir terminé leurs études) grâce aux différents concours d’idées qu’ils ont remportés. Inutile donc de préciser que l’idéation tient un rôle essentiel dans leur processus créatif. Concrètement, ils considèrent le dessin comme la racine de cet arbre à ramifications qu’est l’architecture.
Ils ont échangé sur ces thèmes, ébauches et plans en main, avec un petit groupe d’architectes et de professionnels pendant la première de la série de conférences Espacio y Materia, organisées par le blog Tectónica à l’espace Finsa21. Chez Connections by Finsa, nous avons infiltré cette réunion pour vous rapporter les idées principales représentées par trois constructions madrilènes : la crèche d’Arganda del Rey, l’espace de Mayte Commodore et le duplex de Torres Blancas.
Le dessin selon Picado de Blas : instrument de la pensée
Les deux architectes s’accordent à dire que la meilleure architecture est « l’architecture immersive, celle qui se voit ». C’est pour cette raison qu’ils voyagent et veillent à dessiner dans des cahiers tous les endroits qu’ils visitent, « avec l’objectif de figer ce qui nous intéresse pour le retrouver intact une fois rentrés », expliquent-ils d’une même voix. « Il n’est pas important que ce soit un super dessin, parce que le pire dessin sera toujours celui qui n’a pas été fait. Ce qui compte c’est d’exprimer non pas l’aspect mais le concis, afin de retenir ce qui est le plus pertinent » expriment-ils. Ils citent comme exemple les cahiers de Le Corbusier : « ses dessins n’étaient pas magnifiques et même plutôt basiques, mais ils dégageaient une certaine puissance et avaient du sens, c’est pourquoi nous défendons l’idée du dessin comme instrument de la pensée ».
« Le dessin permet de passer de la main à l’esprit, et de l’esprit aux idées ; nous accordons plus d’intérêt à la façon dont nous avons réalisé quelque chose, qu’à la réalisation en elle-même ». Ces trente dernières années, ils ont pu observer une évolution au niveau de l’esquisse, « parce que la technique et le contexte changent également ». Les deux professionnels n’hésitent pas à reprendre leurs cahiers pour traiter les projets déjà construits : « c’est comme lorsque vous relisez un grand classique comme Don Quichotte, vous ne l’interprétez pas de la même façon aujourd’hui que lorsque vous l’avez lu il y a quelques années, parce que votre contexte a changé ». Ils prennent un crayon, une feuille de papier et résument trois de leurs projets pour lesquels l’esquisse et la formation d’idées ont joué un rôle prépondérant.
Le premier contact avec un bâtiment public
« Pour ce projet, les premières ébauches ont été dessinées en gardant à l’esprit qu’il s’agit du premier bâtiment public visité par un citoyen : la crèche. Nous avons commencé en pensant aux bras rassurants d’un père, à un berceau sans barreaux, à quelque chose de transparent qui ne donne pas la sensation d’enfermement et qui soit en lien avec l’extérieur » expliquent-ils tout en élaborant le croquis en regardant à peine la feuille de papier. « Il est primordial de se mettre à la place de celui qui va avoir l’usage de cet espace : l’enfant voit le monde de façon circulaire, pas linéaire, nous avons donc pensé à des espaces concaves ou convexes comme des tipis et des petits châteaux forts ».
Le dessin comme essence : Mayte Commodore de Gutiérrez Soto
« On se demande parfois comment on a fait pour gagner ces concours » plaisantent-ils. Leurs points de vue divergent concernant ce dessin : « c’était notre façon de communiquer à propos de cet espace, pour cela nous avons filmé toutes les étapes du projet en séquences rapides » déclarent-ils. « Nous voulions visualiser les gens en train de profiter de cet espace mythique, nous les avons représentés dans chaque scène et vivions cet instant avec eux », ajoutent-ils tandis que les silhouettes peuplent le croquis.
L’architecture, sens principal
« Pour le ressenti, l’architecture est plus importante que le sens du toucher, que presque tous les sens… c’est l’atmosphère et les textures » racontent-ils à propos du duplex de Torres Blancas. Dans le cadre de ce projet, il a fallu décider s’il valait mieux créer un tout nouveau projet ou reprendre l’approche initiale de la structure, et la solution a alors surgi de ces textures : « en les voyant, nous avons tout de suite compris où poser la limite entre la conservation et la rénovation ».
Les conférences sur le thème Espace et matière se poursuivront sur trois sessions auxquelles participeront Victoria Acebo et Ángel Alonso, de aceboXalonso Studio, José Selgas et Lucía Cano, de Selgas Cano et Efrén García Grinda et Cristina Díaz Moreno, de Amid Cero 9. Connections by Finsa vous dira tout de ces rencontres sur les processus créatifs avec des studios de référence en Espagne.